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Réaction – Affaire Sitor Ndour, violences faites aux femmes : La grosse colère des organisations de défense des femmes

L’affaire Sitor Ndour et les violences faites aux femmes inquiètent l’Association des juristes sénégalaises. Ce mercredi, elle a convié, avec d’autres organisations de défense des droits des femmes et des filles, à un point de presse pour alerter l’opinion sur les dérives sexuelles dont les femmes sont victimes et apporter leur soutien à la «victime» de Sitor Ndour qui a été acquitté par la Chambre criminelle au bénéfice du doute.

Par Alpha SYLLA – La clameur le poursuit toujours même s’il a recouvré la liberté. Les organisations de défense des droits des femmes s’inscrivent en faux contre le jugement rendu dans l’affaire opposant Sitor Ndour, accusé de viol, à sa jeune domestique. Réunies en point de presse ce mercredi, à 11h au Musée de la femme Henriette Bathily, les militantes des droits des femmes ont fait part de leur totale incompréhension quant à la décision du Tribunal. Devant les journalistes et quelques dizaines de femmes, les «féministes» ont tenté d’éclairer l’opinion sur l’affaire et apporter leur soutien à la «victime». «C’est avec surprise que nous avons appris la décision de Justice concernant le viol sur Adama (jeune domestique) qui est une mineure», a déclaré d’emblée Mme Amy Diallo, présidente de l’Association des juristes sénégalaises (Ajs), organisatrice de la rencontre. La juriste se demande, en annonçant un tel verdict, quel signal la Justice sénégalaise veut renvoyer à la victime, aux femmes vulnérables et à toute la société.

600 cas de viol

Cette affaire mérite des questionnements. C’est ce que pense, du moins, Maïmouna Astou Yatte. Pour la présidente de Jgen Sénégal, qui salue la venue de la maman de la victime, le Sénégal renvoie une mauvaise image de lui en refusant d’appliquer la loi sur la criminalisation du viol. «Comment ces gens vont percevoir nos institutions dorénavant ?», se questionne-t-elle. Répondant à une question sur les deux poids, deux mesures concernant l’affaire Sonko-Adji Sarr et celle Sitor-Adama, Mme Yatte estime que les militantes féministes ont le droit de se positionner en restant sur les principes, de parler de l’ensemble des cas de viol présumés, quelle que soit la personne victime de violence sexuelle. «Dans notre travail, nous n’avons pas d’indignation sélective. Les principes de Droit et de Justice doivent guider tous nos engagements et interventions», estime-t-elle.Selon le décompte fait par l’Ajs, plus de 600 cas de viol ont été recensés depuis 2021. Des chiffres qui paraissent paradoxalement élevés, vu la sévérité de la loi. La loi n°2020-05 du 10 janvier 2020 criminalise les délits de viol et de pédophilie. Mieux, cette loi devrait aussi barrer la route aux délinquants sexuels. «Ce qui est important avec cette loi, c’est qu’elle exclut d’office certaines mesures d’aménagement des peines et des circonstances atténuantes. C’est aussi une loi forte dont une procédure avec une prescription de l’action publique plus longue, la traduction des accusés devant la Chambre criminelle, la détention provisoire sans limitation de durée. Cette loi prend en compte quatre infractions, à savoir le viol et la pédophilie, l’attentat à la pudeur et le harcèlement sexuel», explique Mme Penda Seck Diouf, présidente de la Synergie des organisations de la Société civile.Dénonciation et sensibilisationLe constat est que, malgré la sévérité de la législation, les femmes continuent d’être les proies des prédateurs. Ainsi, pour mettre fin à la souffrance féminine liée aux abus sexuels, les organisations féminines veulent jouer sur la carte de la sensibilisation pour une application effective de la loi. Amy Diallo : «La motivation qui a amené son adoption, c’est combattre les violences sexuelles, en particulier le viol et la pédophilie… Depuis le vote de cette loi, nous n’avons pas arrêté de faire de la sensibilisation. Parce qu’elle s’adresse aussi bien aux victimes, à la société, qu’aux autorités chargées de l’application de cette loi.» Selon elle, les problèmes de témoignage et le manque de dénonciation vont à contre-sens de la lutte contre les violences basées sur le genre. C’est pourquoi, pense-t-elle, les militantes doivent continuer les activités de sensibilisation et de dénonciation. «Ce que fait l’Association des juristes du Sénégal (Ajs) comme toutes les associations de défense des droits de la femme et de l’enfant, c’est la sensibilisation auprès des autorités nationales qui, seules, sont capables pour revoir les textes existants. Pas plus tard qu’hier, il y a eu, à Kaolack, une association de femmes qui a organisé un séminaire sur un article du Code de la famille qui porte ce refus de paternité. Puisque c’est la législation nationale, il faut que les autorités accèdent à la demande des associations de défense des droits des femmes. Et que cet article soit révisé», renseigne Mme Diallo.Sous un autre rapport, ces organisations demandent l’application effective de cette loi pour «protéger les vulnérables et éradiquer les violences sexuelles». Les féministes rappellent également aux autorités judiciaires notamment la nécessité de prendre des mesures alternatives pour les femmes enceintes ou allaitantes reconnues coupables par la Justice.Jugé pour viol sur sa domestique de 16 ans, Sitor Ndour, qui a été placé sous mandat de dépôt au mois d’août et risquait 10 ans de prison, a été acquitté par la Chambre criminelle qui a vidé l’affaire. L’ancien Directeur général du Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud) a été blanchi au bénéfice du doute. Après la décision du juge, le Parquet et la partie civile ont décidé d’interjeter appel.L’article Réaction – Affaire Sitor Ndour, violences faites aux femmes : La grosse colère des organisations de défense des femmes est apparu en premier sur Lequotidien – Journal d’information Générale.SHAREVISIT WEBSITE